L’ADEAR28, une structure engagée pour le territoire en faveur d'une agriculture à taille humaine

Franc succès de la soirée ciné-débat « Paysannes : ces femmes qui font vivre nos territoires »

La soirée ciné-débat « Paysannes : ces femmes qui font vivre nos territoires » du 17 octobre a eu un franc succès ! 150 personnes se sont réunies pour échanger et soutenir la cause de femmes du milieu agricole.

Ce mardi 17 octobre, les 5 AMAP (Associations pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne) de l’agglomération chartraine, l’ADEAR 28 (Association pour le Développement de l’Emploi Agricole et Rural) et le PAT (Projet Alimentaire Territorial) de Chartres Métropole ont organisé une soirée au cinéma Les Enfants du Paradis « Paysannes : ces femmes qui font vivre nos territoires ». 150 personnes ont répondu présentes pour venir voir le film "Moi, agricultrice" et échanger avec sa réalisatrice, Delphine Prunault ainsi que 3 paysannes de notre territoire, venues témoigner (Amandine Dupuy, Aude Mornas et Sylvie Arrondeau). Un immense merci à elles quatre pour leur présence !

Aujourd’hui, le tiers des forces vives de l’agriculture sont des femmes. Elles incarnent l’avenir, la relève du monde agricole et peuvent bénéficier des mêmes droits que ceux des hommes. Ce sont les héritières d’une lente conquête de leurs aînées qui ont mené un long combat pour passer de l’invisibilité sociale, d’un métier subi, à la reconnaissance pleine et entière de leur statut. Le film "Moi, agricultrice" retrace cette injustice sociale faite aux femmes de la terre et leurs combats. Il montre aussi que même si l’égalité des droits est acquise dans la loi, la réalité est encore toute autre.

Des témoignages touchants

Trois paysannes étaient présentes et ont partagé leur vécu et les difficultés qu’elles rencontrent parce qu’elles sont des femmes. L’assistance était touchée et soutenante, ponctuant de nombreuses phrases par des applaudissements.

Amandine Dupuy est seule cheffe de l’EARL Ferme Dupuy, ferme en grandes cultures bio. Elle raconte : "dans mes courriers je m’appelle M. Amandine Dupuy" et "au téléphone, souvent, on me dit ’Est-ce que je peux parler au patron - Vous l’avez au bout du fil’ je réponds !". Depuis que son père a quitté la ferme pour lui laisser la main, elle sent bien que beaucoup d’interactions avec ses fournisseurs, partenaires ou ses conseillers sont plus difficiles.

Aude Mornas est cheffe d’exploitation en maraîchage bio avec son mari, à Sours, Aux petits légumes. Par sécurité, leurs débuts se sont faits en deux temps : l’un d’eux gardait un emploi salarié pendant que l’autre démarrait l’installation. Le choix de la personne qui lançait l’activité s’est imposé de lui-même : "durant les rendez-vous, tout le monde ne regardait qu’Alexandre [mon mari]" raconte Aude. Et rejoindre Alexandre sur la ferme n’a pas été simple non plus, "pour le comptable, ça coutait toujours trop cher, il valait mieux investir dans une nouvelle serre par exemple". Si bien que le couple ait dû tenir tête à tous ces conseillers pour oser être enfin officiellement égaux sur la ferme. Et encore maintenant, lorsqu’ils ont besoin d’un prêt "si c’est Alexandre qui appelle, c’est très rapide, alors que moi (qui maitrise mieux les chiffres) je vais devoir démontrer par des prévisionnels, des tableaux, des rapports, etc. que ma demande est logique et bien construite".

Sylvie Arrondeau a rejoint son mari sur la ferme de la Métairie à Dancy (en polyculture-élevage bio) à l’occasion d’un congé parental. Son statut lui assurait le strict minimum de couverture pour travailler sur la ferme, sans être rémunérée. Et prise par le travail et le quotidien elle n’a jamais changé de statut pour devenir cheffe d’exploitation aux côtés de son mari, même après avoir quitté son emploi salarié. Son statut (conjointe collaboratrice) fait que sur sa carte de sécurité sociale, c’est le numéro de son mari qui apparaît. Et il n’est pas rare qu’on l’appelle "Mme Gervais Arrondeau", ce qui l’agace : "Si j’ai pris le nom de mon mari, c’était pour avoir le même nom que mes enfants, rien de plus. Là on me donne non seulement son nom, mais même son prénom ! Je m’appelle Sylvie moi, pas Gervais !"

Des échanges riches

La réalisatrice du film, Delphine Prunault était également présente et a partagé avec la salle la genèse de ce film, qu’elle a dédicacé à sa grand-mère paysanne de l’ombre, sans statut social propre. Elle accompagne souvent des projections de ce film, sorti en 2022 et parfois des femmes artisanes ou commerçantes l’interpellent, car elles partagent un grand nombre des difficultés des paysannes. En effet, les inégalités hommes-femmes ne sont pas spécifiques au monde agricole et nos 4 intervenantes l’ont reconnu, ces difficultés touchent beaucoup de femmes. Mais le monde agricole lui tient particulièrement à coeur pour le rôle qu’il joue dans la société.

Les échanges avec la salle ont été nombreux et intéressants, non seulement sur les statuts et conditions des agricultrices, mais aussi sur la grande fragilité du monde agricole dans le contexte actuel (inflation, baisse du pouvoir d’achat, désintérêt des consommateurs pour le bio, augmentation des marges des industriels et GMS sur les produits bio, changement climatique, crise environnementale, etc.).

Mais que peut-on faire ?!

Alors, quels leviers, quelles actions pourraient être mises en place pour soutenir les paysannes et le monde agricole ? Les idées n’ont pas manqué. Petite liste à la Prévert :

  • On compte beaucoup sur les jeunes générations pour rééquilibrer la balance. Est-ce que l’enseignement agricole aborde cette question du genre ? Ce serait pertinent.
  • Et pour toucher le plus grand nombre, des médias à large diffusion comme un grand film de cinéma serait formidable. Delphine Prunault nous partageait justement qu’un film inspiré de la BD "Il est où le patron" (de Maud Bénézit & Les paysannes en polaire, aux éditions Marabout) est en projet.
  • Ouvrons les yeux et soyons vigilants face au sexisme ordinaire et tâchons d’accueillir et de traiter les femmes comme nous le ferions d’un homme.
  • Une incitation économique de l’Etat pourrait peut-être encourager les femmes conjointes collaboratrices à devenir cheffes d’exploitation.
  • Mieux encore : si la PAC (politique agricole commune) rémunérait les agriculteurs non pas à l’hectare mais à la main d’œuvre (chef.fe d’exploitation ou salarié.e), cela aiderait à valoriser le travail des femmes, et cela permettrait qu’il y ait plus de paysan.nes dans les campagnes, pour produire de l’alimentation locale mais aussi pour se serrer les coudes et s’entraider.
  • Face à l’enjeu de la transition agroécologique, pour les amapiens présents dans la salle, aucun doute : "Plus que jamais, nous consom-acteurs, amapien.es et simples ’mangeurs’ devons-nous montrer solidaires avec celles et ceux qui nous nourrissent et nous nourriront de leur travail respectueux de l’avenir : les paysan.nes de proximité." Ils encouragent donc à acheter local (ou au moins français) et bio, en rejoignant une AMAP, en allant au marché ou encore dans une boutique à la ferme ou de produits locaux.

Un bilan unanimement positif !

La soirée s’est terminée autour d’un petit pot, pour les organisateur.rices c’était un franc succès et les retours étaient unanimes :

"J’ai adoré. J’ai appris des choses. C’était émouvant."

"Je voulais exprimer encore une fois mon ravissement envers le succès et la qualité humaine de l’événement d’hier soir ! Bravo à tous les participants et aux organisateurs !"

"Cette soirée était passionnante et a permis d’entendre la voix de celles qui n’ont pas toujours le temps ni la possibilité de le faire."

Nous ferons bientôt un bilan plus approfondi avec les co-organisateurs mais c’était une expérience positive, enrichissante et à reproduire, ici ou ailleurs !


Aller plus loin

Actualités